Dimanche
matin. 5h36. Rare congé estival commun non planifié. Chum sans passeport et moi
partons enfin vers l’Isle-aux-grues. Je dis enfin, parce que ça fait quelques
années qu’on veut y aller ; une première fois pour moi, une deuxième pour lui
qui a grandi en face de la contrée lointaine la plus proche de Québec. Pour s’y
rendre, il suffit de cinquante minutes en voiture, puis 25 minutes sur le
traversier qui relie gratuitement les insulaires et visiteurs à Montmagny,
d’avril à décembre. Pour vous faire un portrait général du lieu, imaginez une
île de 10 kilomètres de long par 4 kilomètres de large où habitent environ 130
personnes, près du double en été. On y trouve une
épicerie/quincallerie/pharmacie, un CLSC, un aéroport, quelques gîtes et
restaurants, deux musées, une caisse populaire ouverte deux jours par semaine,
quelques fermes qui fournissent le lait à la fromagerie (l’employeur le plus important du coin), un
camping, un garage, une église, un cimetière, et une superbe vue sur le
Saint-Laurent et les montagnes.
Vue de la tour d'observation |
Toutes
ces belles attractions de village ne sont pas ouvertes à 7h22 le dimanche
matin! Alors on marche pour traverser l’île du Sud au Nord où se trouve le
downtown (là, ça a l’air gros dire traverser l’île, mais on parle d’une route de
1,6km!!), puis on va vers l’Est et on marche encore! On se rend à l’aéroport, gros comme
une petite maison, qui voit passer les enfants du village vers l’école de
Montmagny tous les jours. Puis on monte la tour d’observation, d’où l’on voit les 21
îles qui composent l’archipel. Évidemment on passe un bon moment dans le
cimetière, parce que j’aime beaucoup les cimetières et toute l’histoire d’un
village qu’ils contiennent. C’est fou ce que les gens vivent vieux à
l’Isle-aux-Grues! Ils doivent être plus zen que la moyenne! On jette ensuite un
coup d’œil dans l’église, le temps de serrer la main au curé avant de se sauver
pour ne pas être pris là pendant la messe.
Et on
marche ensuite vers l’Ouest (la route Nord-Sud étant dans le milieu, ça fait
comme un T, donc on ne peut pas faire le tour de l’île par un chemin normal!)
Mine de rien on a faim, alors on veut aller manger au Bateau Ivre, un bateau
qui a volontairement été échoué là pour en faire un resto et un lieu de fête.
Il faut avoir faim au bon moment dans un petit village…parce que le déjeuner
finissait à 10h et il est passé 11h et il n’y a pas de dîner offert là! L’estomac
dans les chevilles (pas aux talons, mais ça s’en vient!), on rebrousse chemin,
retraverse vers la rive sud pour aller au restaurant où je sais qu’il y a un
brunch où nous pourrons rapidement ingurgiter l’énergie dépensée dans les
quatre heures de marche du matin. On en prend assez pour marcher un autre
10-12 h au besoin… Joie alimentaire, quand tu nous tiens.
Sur un
mur de l’Auberge du Grand Héron, un coup mon estomac remonté à sa place
habituelle, je vois une affiche où on parle de la balade en train offerte aux
touristes. Je savais déjà qu’il y avait un train (en fait il y en a même deux!)
tiré par un tracteur, pouvant trimbaler jusqu’à environ 80 personnes en même
temps, mais j’avais l’impression qu’on transformait le lieu en genre de zoo où
les citadins peuvent observer l’insulaire dans son habitat naturel. Nous avons
quand même pris la visite en train, d’abord pour avoir de l’information et
aussi parce que c’est plus facile (et pertinent!) d’avoir une opinion si on a
essayé la chose avant. Pour 20$, on se promène pendant près de deux heures,
allant du restaurant qui a fait pleurer nos papilles affamées quelques heures
plus tôt, jusqu’à la luxueuse (et non-accessible!) résidence du peintre Jean-Paul Riopelle, qui a été
un Gruois pendant plusieurs années. On arrête également aux deux musées ainsi
qu’à la fromagerie. Pour bien faire, cette visite devrait durer une heure de
plus pour avoir le temps de tout voir. Nous sommes d’ailleurs retournés au
musée de la mi-carême (que j’aimerais donc voir célébrée dans mon quartier
d’ailleurs!) pour ne pas être à la course. Le centre d’interprétation est très
intéressant, présentant photos et objets en lien avec Riopelle, un naufrage de
bateau, les courses de canots sur glace et la vie quotidienne dans l’ancien
temps. Bref, il y a trois musées en un, on dirait! Nous avons également laissé
notre place à la fromagerie, car plusieurs personnes vont sur l’île avec des
croisières organisées de Québec et ont donc un horaire plus serré que le nôtre.
Nous avons tout de même eu le temps d’attraper cinq fromages lors de notre
deuxième passage.
Les gallonés, costumes traditionnels de la mi-carême, fête malheureusement peu célébrée au Québec, où les gens se déguisent en espérant ne pas se faire reconnaître lorsqu'ils visitent leurs voisins. |
Après
coup, je comprends bien que le train est probablement la façon la plus efficace
de donner un trop bref aperçu des lieux aux gens qui n’y passent que quelques
heures (et dont la moyenne d’âge est assez élevée). C’est aussi là que j’ai
réalisé encore une fois comment cette île sans pont avait une ambiance de
Basse-Côte-Nord : le guide qui déplace la voiture de quelqu’un d’autre sur
le quai puisque les clés sont toujours dans l’auto débarrée, les deux petites
filles qui deviennent rapidement nos amies dans le train (les filles du guide!)
et leur mère qui demande quand est-ce qu’on sort (sortir = quitter l’île).
Au
nombre de vélos à louer qu’on trouve à différents endroits, je me demande
pourquoi il n’y a pas de visite guidée à vélo, question de combler les
touristes actifs, qui sont nombreux à parcourir l’Isle-aux-Grues sur deux
roues. C’est d’ailleurs ce que nous ferons la prochaine fois, puisqu’il nous
reste le chemin des battures de 7 km à voir du côté est et le sentier de
randonnée de 2,5 km dans le côté ouest. Oh oui, on parle déjà de la prochaine
visite! Parce que l’Isle-aux-Grues est ce genre d’endroit où on se trouve
vraiment niaiseux de ne pas y être allés avant, ce genre d’endroit où une
journée nous donne l’impression d’avoir décroché pendant une semaine!
Insulairement
vôtre,
Sarah
sans passeport
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